Edito – Mai 2021
Depuis quand nos politiques sont-ils des ingénieurs?

La campagne autour de la nouvelle loi sur le CO2 et les débats qu’elle provoque me laissent perplexe à l’écoute de nos chers politiciens favorables à ce texte inepte s’exprimant sur l’avenir de la mobilité. Primo, je constate que nombre d’entre eux sont devenus ingénieurs motoristes et docteurs ès mobilité en un temps record. Deuxio, tous sont atteints d’une obsession maladive pour le véhicule électrique à batterie, la seule technologie, selon eux, capable de remplacer le moteur à combustion. Oui, c’est une technologie pertinente et qui a un avenir. Pour autant, cependant, qu’elle réponde à un type d’utilisation bien particulier pour garantir une efficience maximale et que l’électricité qui l’alimente soit «propre». Ne perdons pas de vue non plus que ce transfert technologique engendre nombre de questions subsidiaires liées aux infrastructures et à l’approvisionnement énergétique qui sont, pour l’heure, totalement passées sous silence. Et la problématique est réelle, à commencer par l’infrastructure de recharge, particulièrement indigente.
Il ne faut pas se tromper de combat. L’action en faveur du climat ne concerne et ne doit pas signifier la fin du moteur à combustion, mais celle des combustibles fossiles! Or l’industrie, nos PME, nos Hautes Ecoles planchent depuis plusieurs années sur des carburants alternatifs et renouvelables capables de rendre le transport routier neutre en carbone. Mieux, une solution existe déjà! Savez-vous qu’un véhicule thermique à gaz – techniquement quasi identique à un véhicule essence, donc à un coût accessible – dégage un bilan très proche de la neutralité en CO2 lorsqu’il utilise du biogaz? Qu’en est-il de l’hydrogène, capable aussi bien de délivrer de l’énergie que de la stocker?
En plus de leur obsession pour la «voiture à piles», nos politiques font preuve, dans leurs actes, d’une vision encore plus courtermiste que la prochaine échéance pour leur réélection. Aucune ambition, aucune concertation, aucun engagement, aucun plan réfléchi par exemple autour d’un mix de technologies et d’énergies pour la mobilité afin que chacun puisse y accéder selon ses moyens. Rien, nada, que pouic, ouallou. Par contre eux seuls détiennent LA vérité vraie du «ce qu’il faut faire»…
La récente diffusion télévisée des films «First Man» et «Apollo XIII» m’incitent à tirer un parallèle qui vaut ce qu’il vaut avec l’époque dans laquelle nous vivons: lorsqu’en 1962, Kennedy a annoncé son objectif d’envoyer un homme sur la Lune, il a laissé faire les ingénieurs. Aujourd’hui, nous prenons le risque de faire le contraire. Ce n’est, me semble-t-il, pas demander la Lune que nos élus redescendent un peu sur Terre, fassent preuve de pragmatisme et se concentrent sur les domaines qu’ils maîtrisent.
Jérôme Marchon